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La difficile lutte contre les acteurs du commerce de la pornographie (chronique radio par Olivia Sarton)

Table des matières

Refonder le droit sur la justice
Une chronique présentée chaque semaine par Juristes pour l’enfance sur Radio Espérance
Présentée par Aude Mirkovic et Olivia Sarton, le vendredi à 7h50, 12h40 et 19h05 ainsi que le samedi à 8h20 (durée 3 minutes)

Chronique du 15 octobre 2021 : La difficile lutte contre les acteurs du commerce de la pornographie

A écouter sur Radio Espérance ICI

« Il y a quelques semaines, des associations de protection de l’enfance ont introduit une action en justice à l’encontre de fournisseurs français d’accès à internet, tels que SFR, Bouygues Telecom, Orange, Free etc. Elles leur demandaient l’interdiction d’accès à plusieurs sites pornographiques qui ne restreignent pas l’accès des mineurs, soit qu’ils ne vérifient pas l’âge des internautes, soit qu’ils se contentent de leur demander de cocher une case pour attester qu’ils sont majeurs.
Les associations avaient fait le choix de mettre en cause les fournisseurs d’accès à internet, car elles estimaient impossible d’atteindre directement la source du porno, c’est-à-dire les sociétés éditrices souvent installées dans des paradis fiscaux, et pour lesquelles en général les noms du directeur de la publication ou de l’hébergeur ne figurent pas sur le site.

Le 8 octobre dernier, le Tribunal judiciaire de Paris a rejeté leur demande.
Il a estimé que, pour chaque site internet porno, les sociétés éditrices étaient expressément identifiées et que des adresses permettant un contact direct étaient mentionnées dans les conditions générales et les politiques de confidentialité. Il a donc reproché aux associations de n’avoir pas préalablement pris contact avec les sociétés éditrices et de ne pas les avoir attraites à la procédure, portant ainsi atteinte selon lui au principe du respect du contradictoire.

Alors, il est vrai que la loi du 21 juin 2004 pour la confiance pour l’économie numérique exige, dans les cas généraux, pour initier une procédure contre l’hébergeur ou le fournisseur d’accès à internet, de leur communiquer préalablement la copie d’un courrier adressé à l’éditeur du site demandant l’interruption, le retrait ou la modification du contenu litigieux.
Il n’en reste pas moins que, compte-tenu des dégâts immenses causés par la consultation des sites pornographiques par les mineurs, on ne peut que déplorer le cautionnement par le Tribunal judiciaire de l’irresponsabilité des participants à cet odieux commerce. Le Tribunal aurait en effet pu utiliser une dérogation prévue par la même loi pour la confiance pour l’économie numérique, fondée sur l’intérêt général attaché à la répression des atteintes à la dignité humaine, et ainsi engager directement la responsabilité des fournisseurs d’accès à internet, sans mise en cause préalable de l’éditeur des sites.

On ne peut que déplorer la complicité générale avec la pornographie que cette inertie judiciaire manifeste, et ce d’autant plus que la protection de l’enfance s’étend au-delà même du blocage de ces sites pour les seuls mineurs. La pornographie même si elle n’était consommée que par des adultes, porte atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant du fait même de l’image dégradée de la femme qu’elle véhicule et des violences sexuelles qu’elle banalise et dont on retrouve de plus en plus la trace dans les relations des jeunes adultes ou au sein des familles.
La pornographie porte atteinte en soi à la dignité humaine et aucune irresponsabilité pénale ne devrait être admise pour les acteurs de sa diffusion, qu’ils soient éditeurs des sites, hébergeurs ou fournisseurs d’accès à internet. Il serait grand temps qu’une véritable volonté politique s’empare de ce sujet.

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