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Accident Pierre Palmade : « L’atteinte involontaire à la vie d’un enfant non encore né, c’est un homicide involontaire » (Chronique Radio A.Mirkovic)

Table des matières

Accident tragique ayant mis en cause Pierre Palmade : Aude Mirkovic revient sur la qualification pénale concernant l’enfant non encore né

Chronique Radio Espérance du 17 février 2023

Et le droit dans tout ça ? Une chronique présentée chaque semaine par Juristes pour l’enfance sur Radio Espérance

Présentée par Aude Mirkovic et Olivia Sarton, le vendredi à 7h50, 12h40 et 19h05 ainsi que le samedi à 8h20 (durée 3 minutes)

Émission du 17 février 2023 à écouter ICI

Chers amis auditeurs bonjour et bienvenue dans la chronique des Juristes pour l’enfance, « Et le droit dans tout ça », présentée aujourd’hui par Aude Mirkovic.

Je reviens cette semaine avec vous sur ce tragique accident de voiture dont vous avez entendu parler puisqu’il met en cause l’acteur humoriste Pierre Palmade, accident dans lequel une femme enceinte, si j’en crois les informations données par les médias, a perdu l’enfant qu’elle portait.

Quelle est la qualification pénale de ces faits ?

Est en cause l’article 221-6 du code pénal qui incrimine le fait de porter involontairement atteinte à la vie d’autrui. C’est l’homicide involontaire. L’enfant non encore né est-il donc un autrui, dont l’atteinte à la vie relève de l’homicide involontaire ?

La Cour de cassation, en 2001, a décidé que non, au motif que l’interprétation stricte de la loi pénale s’oppose à ce que l’infraction d’homicide involontaire soit étendue au cas de l’enfant à naître.

Cette jurisprudence est fort contestable : en effet, si le code pénal sanctionne l’atteinte à la vie d’autrui, c’est pour préciser que l’atteinte à sa propre vie ne relève pas de ce texte. Il faut que soit en cause la vie d’autrui : or la science a progressé depuis l’époque où l’enfant in utero était considéré comme une partie des entrailles de la mère, pars viscerum matris comme disaient les Romains.

L’enfant non encore né est bel et bien un individu distinct de sa mère. Le résultat de cette jurisprudence de la Cour de cassation est le suivant. Lorsqu’un fœtus est blessé dans un accident et nait vivant avec des séquelles de ses blessures ; l’auteur de l’accident est coupable de blessures involontaires sur la personne de l’enfant.
En revanche, si le bébé décède sur le coup et ne nait pas vivant, il n’y aura aucune qualification pénale.

En pratique, celui qui a blessé un enfant dans le ventre de sa mère a « intérêt », juridiquement au moins, à ce que l’enfant ne naisse pas.

Un médecin, auteur d’une faute médicale ayant blessé le fœtus, a intérêt à ne pas sauver l’enfant. Je ne dis pas que c’est ce que font les médecins. Je dis seulement que c’est le résultat de cette jurisprudence inhumaine.

Mais la contradiction ne s’arrête pas là ; cet enfant, décédé dans le ventre de sa maman, pourra être déclaré à l’état civil. Il pourra recevoir des prénoms, son nom de famille même depuis la loi du 6 décembre 2021. Il pourra également être inhumé dans le caveau de famille au cimetière. Et pourtant, la Cour de cassation dit que l’atteinte involontaire à sa vie n’est pas un homicide involontaire.

Cette jurisprudence est un tel déni du réel que ; en 2014, le tribunal correctionnel de Tarbes a fait de la résistance pour retenir l’homicide involontaire pour des faits similaires.

Malheureusement, ce jugement avait été réformé en appel, mais il est possible d’espérer que cet accident tragique dont nous parlons sera aussi l’occasion de faire progresser le droit et que le procureur saisi de cette affaire rendra aux faits la qualification qui est la leur : l’atteinte involontaire à la vie d’un enfant non encore né, c’est un homicide involontaire.

C’est la réalité, c’est le droit, quoi qu’en dise la Cour de cassation.

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