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Service national universel (SNU) : JPE dépose un recours au Conseil d’Etat

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SNU_un_recours_pour_exces_de_pouvoir_depose_par_JPE

Communiqué de presse du 13 février 2020

L’association Juristes pour l’enfance se prépare à déposer devant le Conseil d’Etat un recours pour excès de pouvoir contre le décret du 19 décembre 2019[1], dont l’article 2 attribue à la direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative la tâche d’assurer « la mise en œuvre du service national universel », en précisant que, « à ce titre, elle en définit le cadre réglementaire et en assure le pilotage et la coordination. »

Ce décret est illégal en ce qu’il délègue au Ministère de la Jeunesse un dispositif appelé Service National Universel (SNU). Or, le seul Service national universel (SNU) qui existe légalement est défini de manière stricte dans le Code du service national. Il correspond depuis 1997 à notre service militaire actuel qui comporte uniquement le recensement, la journée défense et citoyenneté et l’appel sous les drapeaux, ainsi que le service civique et d’autres formes de volontariat définies de manière précise et exhaustive dans le Code.

Le décret du 19 décembre 2019 méconnait donc la loi pour au moins deux raisons :

– il délègue au Ministère de la Jeunesse la mise en œuvre du Service national universel qui relève en vertu de la loi du Ministère de la Défense

– il donne à un dispositif improprement dénommé SNU un contenu tout à fait différent du Service national universel déjà défini par la loi.

L’utilisation des termes de « service national universel » pour désigner tout autre chose que ce qui existe déjà sous le même vocable est source d’incompréhension et de confusion. Cela heurte directement le principe de clarté et d’intelligibilité du droit, qui est un principe à valeur constitutionnelle.

Plus largement, l’utilisation de ce vocable « service national universel » est source d’une ambiguïté soigneusement entretenue alors que la campagne de recrutement des volontaires pour l’édition 2020 du Service national universel (SNU) vient d’être lancée par le secrétaire d’Etat à la Jeunesse, Gabriel Attal.

L’objectif de ce SNU gouvernemental 2020 n’a rien à voir avec une formation sur la défense, en dépit de l’uniforme ou de certaines pratiques à connotation militaire comme le lever des couleurs ou la participation à des cérémonies : le but aujourd’hui affiché du SNU est de transmettre des « valeurs républicaines », la transmission dans le cadre scolaire habituel n’atteignant pas son objectif ( transmission d’un socle républicain, renforcement de la cohésion nationale, développement d’une culture de l’engagement et accompagnement de l’insertion sociale et professionnelle).

Le dispositif est d’ailleurs passé sous l’égide de l’éducation nationale, sans le moindre fondement juridique pour la phase expérimentale 2019 et sur le fondement d’un décret entaché d’illégalité pour la seconde édition 2020.

L’association Juristes Pour l’Enfance :

– condamne la confusion créée par le gouvernement entre la conception du SNU défini dans le Code du service national et visant à préparer des jeunes majeurs à la défense de la nation, et la conception actuelle, à caractère civique sous l’égide de l’éducation nationale, qui commence par un stage de 15 jours, appelé « séjour de cohésion », proposé auxjeunes garçons et filles de 15 ou 16 ans, en hébergement collectif : contrairement aux jeunes majeurs de 18 ans ou plus autrefois appelés au service militaire, la cible du nouveau SNU est constituée par des enfants mineurs encore placés sous la responsabilité et l’autorité de leurs parents (article 371-1 du Code civil).

– alerte les parents sur le démarchage opéré par le gouvernement directement auprès de leurs enfants, alors qu’aucune garantie réelle n’est apportée sur les mesures propres à assurer la sécurité des enfants.

– s’interroge sur la répartition des jeunes dans des cohortes (groupes de 10) composées de jeunes scolarisés, en apprentissage ou déscolarisés, en vue d’un brassage géographique et social des enfants : est-ce le rôle des jeunes de 15 ans, qui n’ont en outre pas de formation pour cela, de prendre en charge d’autres jeunes déscolarisés, en grande difficulté psychologique ? Comment peut-on imaginer maintenir, dans un cadre fermé pendant 15 jours avec des objectifs de lutte contre l’illettrisme et l’analphabétisation, des jeunes que l’Education nationale a échoué à scolariser en milieu ordinaire ?

– s’interroge sur le gaspillage de l’argent public : alors que le manque de personnel qualifié pour s’occuper des jeunes dans le cadre de l’aide sociale à l’enfance est dénoncé de toute part, où va-ton recruter des adultes censés être expérimentés dans l’encadrement des 30 000 adolescents attendus cette année au SNU ? Pourquoi ne pas affecter cet argent aux structures qui œuvrent déjà auprès des jeunes, notamment ceux en difficulté, qui en ont dramatiquement besoin ?

– s’oppose à la généralisation du SNU annoncé à terme obligatoire, ce qui réaliserait une atteinte sans précédent à l’autorité parentale puisque les enfants seraient soustraits à leur famille et enrôlés dans ce projet sans l’accord des parents. Un tel dispositif obligatoire serait d’ailleurs contraire à la Constitution qui ne permet la sujétion des personnes que dans un but de défense nationale.

[1]Décret n° 2019-1405 du 19 décembre 2019 modifiant le décret n° 2005-1795 du 30 décembre 2005 portant organisation de l’administration centrale du ministère chargé de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

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